Fabre D' Olivet.
Observons ici un point important. A la Chine, ou la piété filiale est regardée comme la racine de toutes les vertus et la premiére source de l' enseignement, a l' exercice des devoirs qu' elle impose ne recoit aucune exception. Comme le législateur y enseigne que le plus grand crime est de manquer de piété filiale, il suppose que celui qui a été bon fils sera bon pére, et qu' ainsi rien ne brisera le lien social ; car il établit d' abord que cette vertu embrasse tout, depuis l' empereur jusqu' aux derniers de ses sujets, et qu' elle est pour les peuples ce qu' est la régularité des mouvements célestes pour l' espace éthéré : mais en Italie et en Gréce, ou Pythagore établissait ses dogmes, il aurait été dangereux de lui donner la meme extension, puisque cette vertu n' était point celle de l' état, aurait entrainé nécessairement des abus dans l' autorité paternelle déja excessive chez quelques peuples. C' est pourquoi les disciples de ce philosophe, en faisant remarquer la différence des actions nécessitées ou volontaires, jugeaient sagement qu' il fallait en appliquer ici la distinction : ils recommandaient donc d' honorer son pére et sa mére, et de leur obéir en tout ce qui regarde le corps et les choses mondaines, mais sans leur abandonner son ame ; car la loi Divine déclare libre ce qu' on n' a pas recu d' eux, et l' affranchit de leur puissance. Pythagore d' ailleurs avait favorisé cette opinion, en disant qu' aprés avoir choisi un ami parmi les hommes les plus recommandables par leurs vertus, il fallait s' instruire par ses actions, et se régler sur ses discours : ce qui témoignait la haute idée qu' il avait de l' amitié.
F.O.