Plutarque .
avec le flatteur , tout commence par une insinuation progressive qui devient , si la victime s' enhardit , profusion galopante , inflation diabolique ou prolifération cancéreuse . s' il est question d' éloge par exemple , de peur de passer pour un flagorneur grossier , le flatteur emploiera la prosopopée , mettant les louanges de sa dupe dans la bouche d' autrui ; ou bien , complimentant a contrario , il blamera les vertus que n' ont pas ceux qu' il flatte . cette imagerie qui commence si bas finit par faire du volume , au point qu' un flatteur sous - estimé gagne peu a peu l' estime de sa victime . on commence par ce ballet d' ombres vaines , avant d' aborder le royaume de la consistance . car toute la technique du flatteur réside dans cet art de s' installer qui est aussi un art d' accrocher ou , mieux , de crocheter la serrure de l' assentiment . au départ , la crainte d' étre suspecté oblige l' adulateur a partir de l' infinitésimal . pour louer , il parlera net , usant d' une certaine franchise : celle qui ne vise a dénoncer que les défauts secondaires , ou bien , a la rigueur , il se servira d' un compliment muet . ces précautions lui vaudront un surcroit de reconnaissance . en effet , la discrétion , la prudence , et tout ce qui passe pour tel , doublent la flatterie d' un prix extraordinaire , qui la dore et la fait resplendir .
Maraichaux .