Les Présocratiques.

Tout cela peut nous rendre Empédocle bien lointain.....Il y a cependant quelque chose qui fait de lui un auteur véritablement moderne : il ne disparait pas totalement derriére son oeuvre. Encore la révélation dont il se fit porteur se veut elle en plein accord avec la Vérité elle meme, ce qui exige qu' il se place, avant de la transmettre, sous la protection divine. Son invocation a la Muse n' a rien d' ornemental ni de conventionnel ; elle lui permet de demander le don du discours véridique. Pour Empédocle comme pour ses pairs, l' obtention d' une connaissance supranormale a pour premiére condition une attitude révérencielle a l' égard de la Vérité et réceptive aux influences d' en haut - l' Eusébié du fragment 3. On a fort bien remarqué que, " Comme toutes les réalisations qui ne dépendent pas entiérement de la volonté humaine, la création poétique contient un élément qui n' est pas choisi, mais.....divinement donné." C' est assez dire que, par l' expérience intime dont il bénéficie, le poéte des Anciens ages occupe une place particuliére au séjour des hommes ; combien Empédocle continue d' appartenir a la mentalité pérenne, de la meme maniére qu' un Héraclite lorsqu' il se présente comme l' interpréte en mode humain d' un Logos qui le transcende. Bien plus, le poéte Sicilien ne demande point a la Déesse détentrice des Vérités cachées de lui en révéler le tout, a la différence de ces fous qui veulent tout connaitre - fragment 2 - ce qui ne l' empéche pas, en d' autres occasions, d' attribuer au Sage le pouvoir d' étendre la durée de sa conscience mnésique au - dela des limites d' une seule existence.

Grande est la difficulté d' identifier certains auteurs Anciens, qui n' ont pour signature qu' un nom conventionnel. Le probléme devient meme insoluble dans des cas aussi typiques que la querelle Homérique et l' énigme Shakespearienne, ou les individualités humaines s' effacent derriére des associations initiatiques auxquelles elles appartiennent.

Les Muses, filles de Mnémosyne, fournissent au poéte la vision du passé et du futur, et raménent du fond de son esprit les connaissances qui font de lui un voyant. Le substantif lui meme est formé sur la racine MN, qui se rapporte a la fois aux notions de Lune, mémoire et mental. Voir le Sanskrit " Manas."

B.J.