Pythagore.
Il semble que Lysis, prévoyant les mauvaises inductions qu' on pouvait tirer de ce qu' il venait de dire, et commre s' il eut pressenti qu' on ne manquerait pas de généraliser l' influence de la Nécessité sur les actions des hommes, ait voulu d' avance s' opposer au dogme destructeur de la Fatalité, en établissant l' Empire de la Volonté sur les passions. Ceci est dans la doctrine de Pythagore, le vrai fondement de la liberté de l' homme : car il n' y a, selon ce philosophe, personne de libre que celui qui sait se commander, et le joug des passions est bien plus pesant et plus difficile a secouer que celui des plus cruels tyrans. Cependant Pythagore n' avait pas prescrit, suivant ce que dit Hiéroclés, de détruire les passions, ainsi que les Stoiciens l' enseignérent par la suite ; mais seulement de veiller sur elles et d' en réprimer l' excés, parce que tout excés est vicieux. Il regardait les passions comme utiles a l' homme, et quoique produites en principe par la Nécessité, et données par un Destin irrésistible, comme soumises néanmoins dans leur emploi a la Puissance libre de la Volonté. Platon avait bien senti cette vérité, et l' avait fortement indiquée dans plusieurs endroits de ses ouvrages : on la trouve surtout dans le second dialogue d' Hippias, ou ce philosophe montre évidemment, sans paraitre en savoir le dessein, que l' homme bon ou méchant, vertueux ou criminel, véridique ou menteur, n' est jamais tel que par la Puissance de sa Volonté, et que la passion qui le porte a la vertu ou au vice, a la vérité ou au mensonge, est nulle par elle meme ; en sorte qu' aucun homme n' est méchant que par la faculté qu' il a d' étre bon ; ni bon, que par la faculté qu' il a d' étre méchant.
F.O.