Religion Astrale.
Nous voudrions essayer d' analyser ici les caractéres de ce mysticisme sidéral, forme originale, s' il en fut, de la dévotion, expression curieuse et peu connue du sentiment religieux dans l' Antiquité.
La magnificience du ciel étincelant a toujours vivement impressionné l' homme, et celui qui a joui de la douceur limpide d' une nuit d' Orient, comprendra que l' adoration s' y soit naturellement élevée vers les foyers inextinguibles de la clarté d' en haut. Mais cette émotion cosmique, comme on l' a appelée, a constamment varié d' aprés l' idée qu' on s' est faite de l' univers. La distance est assurément énorme entre les appréhensions des primitifs qui, levant les yeux vers le firmament, craignirent parfois que cette voute solide ne les écrasat en s' écroulant, et la vénération d' un Kant, qui, considérant les systémes stellaires accumulés indéfiniment au - dessus de lui, se sentait saisi de la meme admiration respectueuse qu' il éprouvait pour la loi morale percue en lui par la raison. Le sentiment a évolué avec les progrés de la connaissance a mesure que se précisaient les notions d' immensité et d' éternité. Pour les Grecs, le cosmos n' éveillait pas, comme pour nous, la pensée troublante d' une étendue prolongée a l' infini au - dela des plus lointaines nébuleuses que le télescope puisse atteindre. Le monde avait alors des bornes. Au - dela de la sphére des étoiles fixes, qui l' entourait de toutes parts, les anciens ne supposaient plus rien que le vide ou l' éther. Le ciel était pour leur astronomie, comme la terre pour leur géographie, une expression beaucoup plus limitée que pour les modernes. L' énormité des constellations visibles n' était pas suivant eux aussi écrasante que selon notre science, et leurs distances leur suggéraient moins l' idée d' un éloignement tel que le chiffre meme de sa mesure dépasse la portée de notre imagination. En plongeant leurs regards dans les profondeurs de l' espace, ils n' étaient pas saisis au meme degré du vertige des abimes, ni accablés autant du sentiment de leur petitesse. C' était surtout d' admiration qu' étaient frappés les anciens.
Cumont.