Religion Dans L' Antiquité.
Si la confiance en la bonté divine domine dans Pindare, la préoccupation de la fatalité domine le drame tragique. Les poétes cycliques, que les dramaturges Athéniens mettaient si largement a contribution, paraissent s' étre complus a engager dans d' inextricables collisions les trois éléments actifs dont l' effort donne le branle aux choses, la fatalité immuable, l' initiative humaine et, entre les deux, la volonté divine. Le mythe d' Oedipe, en particulier, qui avait fourni la matiére de plusieurs épopées cycliques, est un modéle de ce genre de problémes moraux, que développait avec une sorte de prédilection la poésie de cet age troublé par les premiéres hardiesses de la philosophie naissante. Tout contribuait a pousser les esprits vers les doctrines fatalistes. D' un coté, la vogue croissante des oracles affermissait le fatalisme religieux, car ces institus mantiques tenaient a passer plutot encore pour rendre des arréts infaillibles que si l' effet en était inévitable. Sans doute, il résultait de la que ces prédictions n' étaient d' aucune utilité pratique, mais cette conclusion ne menacait nullement le prestige des oracles et ne risquait pas, par conséquent, de décourager leur clientéle. D' un autre coté, les " physiciens " de l' Ionie créaient l' idée de loi " naturelle ", de forces aveugles inhérentes a l' essence meme des choses et se manifestant dans l' enchainement fatal des causes et des conséquences. Cette fatalité naturelle, désignée par des noms nouveaux, prenait place a coté du destin des théologiens, sans sourire plus que lui aux espérances des mortels. La liberté humaine, battue en bréche de toutes parts, risquait de succomber. Avec elle aurait disparu le plus grand obstacle que rencontrat sur sa route la science de l' avenir.
Leclercq.